En revanche, si nous mettons un ordinateur dans un robot, tel qu’on le décrit d’habitude en science-fiction. Celui-ci à plus ou moins forme humaine, construit à base de métal résistant. La plupart du temps les auteurs de science-fiction se montrent avares de descriptions techniques, d’abord parce qu’elles ne sont pas essentielles à l’histoire, et surtout parce qu’ils seraient bien en peine de fournir une explication détaillé. Néanmoins, il ressort généralement dans ces romans qu’un robot est constitué de circuits alimentés par un courant électrique, qui lui tiennent lieu de vaisseaux sanguins. Quant à la source d’énergie principale, elle est soit non spécifiée, soit dérivée de l’énergie nucléaire.
Mais ne peut on pas transformer un humain en robot ou en cyborg ?
Pour transformer un organisme humain en robot, il faut tout d’abord lui adjoindre des pièces artificielles. La science le permet déjà en partie. Certaines personnes ont des dents par exemple métalliques, et le métal est sûr, le matériau cybernétique par excellence. Toutefois il n’est pas le seul utilisé. J’ai moi même une dent en céramique, qu’à l’œil nu on ne discerne pas de la dentine naturelle. Mais si ces deux matières ont la même apparence et, dans une certaine mesure, la même structure chimique, elles n’ont pas la même origine : la dentine est un matériau vivant et elle porte des traces, a contrario de la céramique. Mais il y a plus. La cage thoracique, qui peut-être fendue dans la longueur suite d’une opération peut-être maintenue par des agrafes métalliques. D’autres personnes sont équipées de prothèses qui, avec les progrès de la médecine, gagnent sans cesse en complexité et en efficacité. Des gens ont vécu des jours et même des mois avec un cœur artificiel, d’autres encore des années entières avec une pile cardiaque.
On peut sans mal imaginer qu’avec le temps, chaque partie du corps humain puisse être remplacée par des matériaux non-organiques ou des prothèses. Y a-t-il une limite, même théorique, à cette avancé scientifique ? Je pense que personne n’hésiterait sur ce point. On peut envisager une méthode de substitution pour chaque membre, chaque organe, sans que le sujet perde pour autant son caractère humain.
Mais le cerveau ?
S’il y a une chose qui nous rend humain, c’est bien lui ! Un individu se définit par la configuration spécifique de son cerveau qui influera sur ses émotions, sa faculté d’apprentissage et le contenu de sa mémoire. Il est impensable de le remplacer par un appareil doué de raison fabriqué à la chaîne dans une usine, car il devrait contenir toutes les connaissances, tous les souvenirs d’un cerveau naturel et imiter sa façon exacte de penser.
Une prothèse peut différer du membre quelle remplace et rester fonctionnelle, de même qu’un poumon, un rein, ou un foie artificiels. En revanche, si le cerveau artificiel , était pas la réplique exacte de celui qu’il remplace, la personnalité du sujet s’en trouverait forcément altérée.
C’est donc bien le cerveau qui pose un problème.
Voyons maintenant le processus inverse (oui je sais c’est mon coté matheuse là encore qui ressort)
Imaginons un robot avec l’apparence d’un humain et à l’intérieur de lui un ordinateur avec une intelligence équivalente voir supérieure à celles des humains. C’est un artiste, un historien, un scientifique, un gestionnaire sera t’il admiré et respecté par tous, si les humains savent que son cerveau est artificiel ? Il y a peut de chance car il ne sera pas un homme à part entière.
Par conséquent, dans chacun des deux cas que nous venons d’étudier, on aboutit à une dichotomie corps /cerveau : l’ultime cyborg n’aura jamais un cerveau assorti au restant de son corps, et il se déclinera en deux versions possible :
un cerveau artificiel dans un corps humain, ou
un cerveau humain dans un corps de robot.
Une chose est certaine : quand nous jugeons un être humain (ou un robot), notre opinion est principalement influencée par son apparence physique.
Une femme éblouie par la beauté d’une autre femme s’exclamera : « Quelle magnifique femme ! » et pourra tomber amoureuse d’elle sur-le-champ. On rencontre ce genre de situation à longueur de pages dans les romans à l’eau de rose. Et bien sûr, un homme aura exactement la même réaction. Si une femme (ou un homme) s’éprend d’un joli visage, il est probable qu’elle (il) s’arrête à d’autres considérations moins superficielles a savoir : « L’élu(e) de mon cœur est elle (il) intelligent(e), facile à vivre, tolérant(e) ? » Et si l’on découvre en fin de compte que la personne en question n’a aucune qualité hormis la beauté, nous lui trouverons le plus souvent des excuses pour pouvoir céder aux exigences de notre libido. Généralement, on finit par se lasser d’une jolie nana (ou d’un bellâtre), toutefois cela peut prendre un certain temps.
En revanche, une personne pourvue des mérites les plus nobles, mais malheureusement affligée d’une laideur caractérisée, a peu de chance de nous ensorceler au premier regard, à moins que nous ne soyons suffisamment intelligent pour déceler en elle les qualités qui nous apporterons toute une vie de bonheur.
Ce que je veux dire, en fait, c’est qu’un cyborg doté d’un cerveau artificiel et d’un corps à apparence humaine sera accepté comme un être humain, tandis qu’un cyborg doté d’un cerveau humain et d’un corps artificiel sera considéré comme un vulgaire robot. Car après tout pour la majorité des gens, notre image reflète notre personnalité.
Ces deux types de cyborgs radicalement différents, ne poseront pas des problèmes similaires.
Pourquoi transférer un cerveau artificiel dans un corps humain, puisque ce dernier est bien plus fragile qu’un corps de robot ? Imaginons un sujet humain, jeune et sain, dont le cerveau serait lésé par un traumatisme quelconque ou une maladie. O, penserait aussitôt : « Quel dommage de gâcher un corps aussi magnifique ! Greffons-lui un cerveau artificiel afin qu’il puisse continuer à vivre sa vie. »
Mais alors la personnalité du sujet s’en trouvera modifiée. Il deviendrait un autre individu, dépourvu d’esprit. Or, si superbe soit-il, un corps est chose commune :il en naît chaque jour un demi-million et il est donc inutile de le sauver parce que son cerveau initial est hors d’usage.
Prenons maintenant le procédé inverse par lequel on transférerait un cerveau humain dans un corps artificiel.
Le cerveau d’un homme n’est pas éternel, néanmoins il peut vibre quatre-vingt-dix bonnes années sans perdre de son acuité intellectuelle. Certains nonagénaires fringants en sont la preuve vivante. En revanche des esprit géniaux ont disparu au bout de vingt ou trente années de vie, simplement parce que le corps qui les abritait (et qui en soit n’avait aucune valeur) avait été fort endommagé. Dans un tel cas de figure, on serait fort tenté de greffer le cerveau naturel dans un corps artificiel, de manière à lui offrir quelques décennies supplémentaires d’une existence utile à la société.
C’est donc ce type de cyborg qui, pour des raisons logiques, tendrait à ce multiplier. Or, comme nous l’avons vu plus haut, une créature de cet acabit serait considérée comme un vulgaire robot. Bien sûr, on peut objecter que c’est l’esprit qui compte et non son support mécanique, ce qui est tout à fait vrai. Je suis d’ailleurs persuadée que tout tribunal impartial accorderait à un cyborg doté d’un cerveau humain les mêmes droits civiques qu’à un homme : le droit de vote, le droit à la liberté, etc.
Mais imaginons qu’un sceptique mette le cyborg au défi de prouver que son cerveau est humain…
Le meilleur moyen consisterait à démontrer qu’il n’est pas soumis aux trois lois de la robotique. Lois imposent aux robots un comportement sociable, il ne resterait plus un cyborg, qu’a faire preuve d’une nature foncièrement méchante, l’argument le plus simple et le plus convaincant étant alors de casser la figure à l’incrédule, puisque aucun robot n’est capable d’un tel geste.
Toutefois, si un cyborg doit sans cesse se montrer violent afin de prouver que son cerveau est humain, il a peu de chances de se faire beaucoup d’amis…
De plus, même s’il est déclaré humain (et par conséquent autorisé à voter, à louer une chambre d’hôtel et à faire toutes les choses que font les humains), la législation devra le distinguer des hommes à part entière. Etant bien plus puissant que ces derniers, le cyborg représentera un danger potentiel. Ses poing d’acier deviendront des armes mortelles. Ainsi on pourra lui interdire de frapper un être humain, même en état de légitime défense, ou encore participer à des compétitions sportives ou faire les jeux olympiques.
Vous me direz : « Mais pourquoi transformer un cerveau humain dans un corps métallique ? Après tut, on pourrait lui fabriquer un corps inoffensif à base de céramique, de plastique et de fibres qui imiteraient la texture et l’aspect du corps humain. »
Bien sûr. Mais de toute façon, je ne crois pas qu’il serait tiré d’affaire pour autant. Il sera toujours différent. Et si infime soit cette différence, les gens ne verront qu’elle.
On sait que les gens dotés d’un cerveau et d’un corps entièrement humains se haïssent parfois à cause d’une légère différence physique : le pigment de la peau, par exemple ; ou la forme du nez, des yeux, des lèvres ou des cheveux. Et s’il n’y avait que l’apparence ! On se tue également pour des disparités culturelles : divergences de religion, d’opinion politique, de lieu de naissance, de langue ou juste d’accent.
Regardons la vérité en face : les cyborgs ne sont pas sortis de l’auberge !
Eléna Tikhvinskaya.